Installer un réseau de distribution en Espagne : la clause à ne pas oublier pour éviter une rupture coûteuse

Les différents contrats formalisant un réseau de distribution se ressemblent dans pratiquement tous les pays européens. C’est particulièrement vrai entre la France et l’Espagne, deux pays dans lesquels les contrats distribution (incluant la concession et la franchise), sont régulés pour l’essentiel par le droit commun des contrats et le droit de la concurrence, eux-mêmes similaires dans les deux pays.

De ce fait, au moment de leur expansion en terre hispanique, et de l’implantation sur la Péninsule d’un réseau de distribution, beaucoup d’entreprises françaises, pour « limiter les coûts », se contentent de traduire leur contrat français.

Notre pratique nous montre que c’est une erreur qui, bien loin de permettre d’économiser, peut au contraire coûter très cher. En effet, si ces contrats ne font l’objet d’aucune réglementation particulière en Espagne (même si un projet de loi régulant le contrat de distribution est en circulation depuis plusieurs années), leur régime a été précisé par la jurisprudence au fil des années.

Il existe ainsi une différence fondamentale entre le droit français et le droit espagnol que l’initiateur d’un réseau en Espagne doit impérativement connaître. Il s’agit du principe selon lequel en Espagne, à la différence de la France, le distributeur en fin de contrat a droit à une indemnité, si cela n’a pas été exclu de manière expresse et non équivoque dans le contrat, et sous certaines conditions.

En effet, les tribunaux espagnols appliquent majoritairement, à tous les contrats de distribution et par analogie, la loi de l’agence commerciale. Cette dernière prévoit qu’en cas de rupture du contrat non fautive et non abusive (donc avec un préavis suffisant dans un contrat à durée indéterminée ou à l’expiration de la durée du contrat à durée déterminée), l’agent a droit à une indemnité de clientèle, dans la mesure où il peut prouver que son cocontractant continue à profiter de manière substantielle de la clientèle que l’agent a développé. C’est cette règle que les juges espagnols appliquent à tous les contrats de distribution.  Le montant de cette indemnité est fixé par la loi à un an de commission, ce que la jurisprudence traduit dans le cas du contrat de distribution en un an de marge.

Cette conséquence de la rupture peut être neutralisée par l’insertion d’une clause excluant expressément toute indemnité de clientèle au moment de la rupture du contrat.  Cette clause est souvent absente des contrats établis par les entreprises françaises, car dans notre environnement juridique le distributeur, en tant que commerçant indépendant, n’a pas droit à une telle indemnité de clientèle. C’est une omission qui peut, nous avons pu le constater, avoir des conséquences assez dramatiques.

Toute entreprise française qui souhaite s’implanter en Espagne doit donc impérativement faire revoir ses contrats par un professionnel et les adapter à la spécificité du droit espagnol.

Virginie Molinier Avocate associée M&B v.molinier@mbavocats.eu

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