Au cours de la dernière décennie, le concept des auberges en Espagne a connu un essor sans précédent qui, sans être nouveau dans le pays, a stimulé le tourisme. (Hosteltur)
Les “hostels,” dénomination anglo-saxonne de ce qu’on a toujours appelé “auberges de jeunesse“, se réinventent autour de “l’expérience de partage” qui attire la nouvelle génération, en particulier les étrangers qui visitent l’Espagne, grâce à la commercialisation online.
Le groupe irlandais Hostelworld, principale plateforme d’auberges au monde, constate ce boom en Espagne. Au cours des trois dernières années, le pays s’est hissé au sommet des destinations internationales les plus prisées.
“L’industrie des hostels s’est développée et a changé radicalement ces dernières années en Espagne. Nous avons assisté à l’ouverture de nombreuses nouvelles auberges et à chacune d’elles, de nouvelles idées et d’excellentes offres de produits “, explique Paul Halpenny, responsable des recettes chez Hostelworld, qui commercialise 410 auberges dans 88 villes espagnoles.
Halpenny connaît la raison de ce succès. “Nos clients recherchent des hostels offrant des expériences authentiques et uniques, ainsi qu’un environnement social dynamique. L’Espagne, propose une parfaite combinaison: là-bas, les hostels fournissent d’excellentes installations, dans un environnement sûr et confortable et favorisent l’expérience sociale au sein des hostels. De plus, ils sont intégrés dans la communauté locale”, explique-t-il.
Barcelone, avec 129 hostels et 10.811 lits, est sans aucun doute la principale destination de ces voyageurs “pour la plupart étrangers”, comme l’a reconnu la présidente de l’Association Catalane des Auberges Touristiques (Acatur), Marta Ventura, qui indique que ce type d’hébergement n’intéresse pas encore les Espagnols. ”
À la différence d’autres logements, les auberges sont très bon marché, disposent de chambres avec lits superposés et d’une cuisine a partagé entre les hôtes. Une véritable vie en communauté.
Plus complexe qu’un hôtel
Cette particularité a fait échouer de nombreux hôteliers qui se sont lancés dans cette activité, explique Juan Carlos Sanjuan, PDG de Casual Hotels, qui a participé à la fondation de Bcool Hostels.
Sanjuan précise qu’il s’agit d’un modèle “qu’il faut très bien connaître” car il est “beaucoup plus complexe à gérer qu’un hôtel”. Dans une auberge, “chaque lit correspond à un enregistrement unique, et non à une chambre comme c’est le cas dans un hôtel”, dans laquelle deux personnes ou plus peuvent séjourner.
Une autre particularité est ‘”la nécessité d’avoir des zones communes où sont organisées des activités”, telles que des fêtes et des réunions et “une phase de socialisation très définie”. Sans tout cela, “l’hostel ne fonctionnera pas“.
Le président de Room007, Ignacio Requena, est du même avis. Il compte justement augmenter son portefeuille d’établissements. La chaîne dispose d’un plan d’expansion national et international très ambitieux qui devrait multiplier par cinq son portefeuille actuel d’ici 2020. Il est actuellement composé de cinq établissements de 600 places. La chaîne prépare huit projets, avec plus de 600 chambres, dont six en Espagne et deux au Portugal.
La complexité de ce modèle affecte même les travailleurs. Marta Ventura, également propriétaire de Jordi Hostels, a déclaré qu’il était nécessaire que les employés soient impliqués dans le fonctionnement de l’auberge et y voient une “expérience de vie” et pas seulement un travail.
Un règlement clair
Cependant cette croissance spectaculaire s’est heurtée aux réglementations locales. Le président d’Acatur reconnaît que “le principal défi du secteur est de disposer de réglementations claires”. La Catalogne a été un pionnier en matière de réglementation des activités en 2003, conformément au règlement de 1994 régissant les hostels.
En fait, l’activité dans la communauté ne se limite pas au ministère du Tourisme, mais à celle de la jeunesse. Actuellement, une mise à jour de ce règlement est en préparation, qui envisage la possibilité d’incorporer trois catégories d’auberges en fonction de leur qualité, similaire au système d’étoiles pour les hôtels.
Dans la Communauté de Madrid et au Pays-basque, ils n’ont été réglementés qu’en 2013, bien que cela soit différent de ce qui a été fait en Catalogne. Au Pays basque, par exemple, les auberges de jeunesse ont été séparées des hostels alors qu’en Catalogne, il n’y a pas de différence entre les deux hébergements.
Nouveaux acteurs
Malgré l’absence de réglementation spécifique, le marché ne cesse de croître et de plus en plus d’acteurs veulent être concurrentiels sur le marché espagnol.
La chaîne la plus innovante de ce secteur est d’ores et déjà présente en Espagne: le groupe britannique Generator, avec un hébergement à Barcelone, ouvert en 2013 et un autre à Madrid, inauguré l’année dernière. À l’heure actuelle, il s’agit de la plus grande chaîne d’auberges en Espagne, avec près de 1.200 lits.
Une autre grande chaîne internationale, A & O Hostels, prévoit de s’implanter dans la péninsule ibérique en 2021, à Hospitalet. L’entrée de Room Mate est imminente et Casual Hotels envisage d’ouvrir sa chaîne d’auberges en 2020. Parallèlement, les hostels Bluesock du groupe Carris feront leurs débuts cette année à Lisbonne et sur la Gran Vía de Madrid.
Les fonds d’investissement commencent, eux aussi, à s’intéresser à ce marché en plein essor. Le groupe espagnol Excem Real Estate a créé en 2017 la Socimi SITUR pour investir dans ce segment. Il prévoit d’allouer 250 millions d’euros à de nouveaux hostels en Espagne et en Europe. Elle compte déjà cinq établissements, dont trois en Espagne, et veut surpasser Generator et devenir la première chaîne nationale avec sa marque Lov Hotels et ses trois lignes: Hatch, Mad et Cat’s.
Et l’avenir promet. Hostelworld se souvient que “l’Espagne continue de figurer parmi les meilleures destinations en terme de réservations de chambre d’hostels. Tant que le marché restera fort, nous ne serions pas surpris d’en voir ouvrir davantage“.
Source et suite: Hosteltur