Au niveau juridique l’Espagne n’a jamais été considérée comme un pays qui facilitait le développement du capital risque et, plus géneralement des investissements dans les starts up d’avenir. En effet les étapes de la constitution des sociètés (obligations pour les associés/actionnaires et mandataires sociaux non résidents d’obtenir un NIE, nécessite d’avoir l’approbations du Registre du Commerce central pour valider la raison sociale choisie, recours au notaire …) peuvent sembler longues et très formelles, donnant ainsi aux investisseurs (pas totalement fausse) de main mise administrative sur les processus entrepreunariaux. De plus, l’Espagne ne s’est jamais dotée d’un statut équivalent a la société par action simplifiée (SAS) française qui est l’instrument sociétaire parfait pour le capital-risque. En effet, lors de la constitution de start-up d’avenir, afin d’éviter des conflits entre actionnaires/associés qui risqueraient de bloquer la société et de nuire considérablement a son activité et a son potentiel, les droits et les obligations de chaque actionnaires/associés doivent être définis avec une grande précision. La SAS permet d’inscrire ces clauses de fonctionnement dans les statuts, les rendant oposables aux tiers et empêchant ainsi toute action commise en violation de ces dispositions. Pourtant, et malgré ce manque d’instrument juridiques adaptés, l’Espagne est le berceau d’un nombre croissant de projets entrepreneuriaux, comme en témoigne, en particulier, l’initiative French Tech à Barcelone. La qualité de vie en Espagne, alliée à la stabilité politique et administrative du pays ainsi qu’au coût relativement modéré du travail, attirent toujours plus d’entrepreneurs aux projets innovants et à la recherche de financements qui accéléreraient leur développement. Les praticiens du droit espagnol ont répondu à ce besoin en perfectionnant les outils dont ils disposent. Ainsi, il existe des moyens d’accélérer et de simplifier la constitution de sociétés, comme par exemple la possibilité d’établir un pouvoir pour l’obtention des NIE des associés et mandataires sociaux ou encore l’utilisation de statuts-types établis par l’Etat pour simplifier la constitution de certaines sociétés et en diminuer les coûts. Certains formalistes constituent également des sociétés ” coquilles ” qui peuvent être cédées en l’espace de deux ou trois jours en cas de nécessité urgente de disposer d’un ”véhicule social” en Espagne. La conclusion de pactes d’actionnaires/associés est également un outil très communément utilisé en pratique. En effet, il est nécessaire, dans les starts-up bénéficiaire de capital-risque, d’encadrer avec précision les relations des actionnaires/associées entre eux et la société. Des tels pactes dont les clauses doivent être négociées avec le plus grand soin permettant de déterminer le rôle des actionnaires/associés financiers. Ces rôles respectifs devront être définis non seulement au niveau de la gestion de la start-up (souvent confiée aux fondateurs avec un droit de regard ou niveau de la gestion de la start-up ( souvent confiée aux fondateurs avec un droit de regard ou de veto pour les actionnaires/associés financiers) mais aussi des obligations de financement de la société (qui, selon leur modalités et leur structuration juridique, peuvent entrainer la dilution dans la capital d’un ou plusieurs actionnaires/associés). De même, les conditions des futures ouvertures ou augmentations de capital pourront être fixées dans le pacte. Le pacte d’actionnaires sert également à définir les conditions d’attribution du résultat potentiel de la société, les mécanismes de résolution des éventuels conflits entre actionnaires/associés et surtout les modalités de sortie du capital de la société. En effet, l’investissement du capital vendue est, par définition, temporaire, l’objectif étand, pour les investisseurs, la revente des actifs en vue de dégager une plus-value. Les pactes d’actionnaires/associés incluent donc souvent des clauses de sortie conjointe, des clauses de valorisation du capital, etc. L’éfficacité de ces pactes est garantie par les tribunaux. Récemment, le Tribunal Supremo a, par arrêt en date du 25 février 2016, à nouveau rappelé que les dispositions d’un pacte d’actionnaires ont force obligatoire, quand bien même elles ne figureraient pas dans les statuts et dérogeraient au droit commun. La pratique utilise donc et adapte les outils juridiques existants pour pouvoir répondre aux objectifs différents mais complémentaires des entrepreneurs et des investisseurs. En conclusion, l’Espagne a su adapter son système juridique au capital-risque et éviter ce faisant que les aspects formels et réglementaires ne viennent contrebalancer la force des critères d’attraction qui font de l’Espagne une destination prisée des entrepreuneurs. Par Virginie Molinier